Ma maison et
moi
Thorigny-sur-Marne.
C’est donc ici au cœur de Thorigny que se déroule un épisode de ma vie de retraitée,
épisode tout à fait imprévu.
Retraite, mot
auquel on aime souvent ajouter l’adjectif paisible… Paisible ma retraite?
Après une vie
professionnelle bien remplie et quelque peu nomade entre Asie, Amérique et bien
sûr France ( Seine et Marne), la retraite est arrivée et avec elle le CHOIX , j’insiste sur le mot, d’une maison
au centre d’une petite ville et aussi une forte volonté de réaliser un rêve
refoulé depuis l’adolescence : peindre.
Après maintes
recherches, je l’ai trouvée, là, rue Gambetta : ancienne comme je les aime;
avec ses poutres, sa cheminée et son histoire et surtout avec la possibilité
d’y installer ( enfin !) un atelier de peinture.
Vivant seule,
munie d’un budget modeste, fruit de mon travail comme pour la majorité d’entre nous,
me voilà devenue propriétaire de cette maison qui daterait du XIXème siècle (la
trace la plus ancienne dont j’ai eu connaissance remonte à 1824 et la maison
n’était pas neuve à cette date) ; maison unique qui ne ressemble qu’à
elle-même. Et me voilà donc lancée dans un emprunt à un âge somme toute avancé,
lancée dans des travaux de rénovation intérieure, en attendant de pouvoir financer
le ravalement afin de restaurer l’extérieur.
Et me voilà même,
en amoureuse éperdue de la Renaissance Italienne, lancée dans la peinture
d’une fresque sur l’un des murs de l’entrée!
Cette énergie
fut déployée avec bonheur jusqu’à un certain jour de janvier 2005 où, alors que
j’étais entrain de décoller du papier peint, un coup de téléphone est venu
percuter ce bel enthousiasme. En effet j’étais informée, sans ménagement aucun,
que « ma maison, cadastrée
AM 98,
était concernée par un plan d’urbanisme, et qu’il serait donc opportun de la
vendre à la mairie, que cette maison disparaîtrait dans le cadre de ce projet
et qu’il serait judicieux de ma part d’envisager dès maintenant d’aller
chercher un domicile ailleurs… »
Je n’avais
jamais rencontré Monsieur THIESSON, Maire Adjoint chargé de l’urbanisme, auteur
de ce coup de fil tout aussi inconvenant que perturbant. Il ne me connaissait
pas davantage. J’étais consternée. La décolleuse de papier peint devenait
complètement incongrue. Elle est, d’ailleurs, restée posée là, pendant
plusieurs semaines. J’étais en plein désarroi : sommeil perturbé, inquiétude,
déception, découragement … C'est cela une retraite paisible?
Certes, ma
maison est préemptable par la mairie si je la mets en vente. Mais je ne veux PAS la vendre . Et quand je l’ai achetée, début 2000, ce projet
d’urbanisme existait-il déjà ? A priori, oui! « Ce projet était dans les
tiroirs en 1995 ». (Le Parisien du 24 Octobre 2007). Personne ne m’en a informée, et
personne n’a informé mes voisins qui ont acheté leur maison en Décembre 2006! Pourquoi?
Pourquoi nous avoir laissés dans l’ignorance de ce projet ?
Une entrevue
avec Monsieur THIESSON et des échanges de courrier ont suivi ce coup de fil de
Janvier 2005. J’ai alors exprimé, confirmé, puis reconfirmé que je ne voulais PAS me séparer de cette
maison de 123 m2 habitables.
Au cours de
l’unique entretien que j’ai eu au service de l’urbanisme en février 2005, Monsieur THIESSON a proposé de procéder
à une offre de prix, malgré mes réticences, et m’a envoyé cette offre en date
du 6 janvier 2006, en réponse à une supposée « demande » de ma part,
demande que je n’avais PAS formulée ! Est-ce écrit assez gros ?
Le prix qui
m’était proposé pour l’achat de ma maison par la mairie m’aurait permis de
faire l’acquisition d’un appartement de 2 pièces de 44,50 m2 + balcon de 7,90 m2
Puis, une
période de silence. Enfin… de silence relatif car des rumeurs circulaient : «…le projet existe toujours…Cela se fera… ».
Et aussi des bruits de bulldozers, les nuits de mauvais rêves avec des murs qui
s’écroulent et des débris de fresque sur le sol.
Mars 2007. La
cadastrée AM 98 est informée par un promoteur immobilier que son domicile est
concerné par un projet d’urbanisme et qu’une rencontre est à envisager pour
organiser les conditions de son départ….Je confirme que je ne veux PAS vendre.
Octobre 2007.
Le projet change d’échelle. Etude pour la création d’une Z.A.C. Neuf
propriétaires sont concernés. Des maisons ancrées dans le patrimoine du cœur de
la ville seront rasées. Nous constituons l’association S.O.S. Thorigny.
Nous recevons
beaucoup de messages de soutien et aussi des témoignages à propos d’autres
projets en cours …
Il ne faudrait
pas croire que je n’ai aucune conscience citoyenne, ni aucune conscience de la
nécessité d’équipements publics et de logements ainsi qu'on voulait
nous le laisser entendre le 17 octobre 2007 à la réunion en mairie en présence
des propriétaires concernés. Mais il ne faudrait pas faire dévier le problème
qui est le nôtre. D’AUTRES SOLUTIONS SONT POSSIBLES et doivent être envisagées
pour répondre aux besoins des habitants.
Des
alternatives ne semblent pas avoir fait l’objet d’études. Au contraire !
Lorsque nous,
Propriétaires de l’îlot Gambetta, avons été conviés en mairie le 17 octobre
2007, Monsieur LASSERET, maire,
Madame QUENEY, 1er maire
adjoint et Monsieur THIESSON, maire
adjoint à l’urbanisme nous ont à l’UNISSON
affirmé haut et clair que le projet de ZAC serait réalisé et en réponse à une de nos questions qu’aucune
alternative ne serait étudiée !
Monsieur DE VALLÉE, architecte urbaniste, présent à
cette réunion a précisé que le premier coup de pioche aurait lieu mi 2009 !
Pourquoi cette
mise en évidence d’un projet qui serait la seule possibilité envisageable ?
Pour faire pression sur des propriétaires qui auraient l’audace de ne pas être
d’accord avec des mesures qui entraînent la destruction de leur maison et qui
bouleversent leur vie ?
Je terminerai
en disant à ceux et à celles qui auront bien voulu me lire jusqu’ici, qu’une
maison, ancienne de surcroît, n’est pas qu’un assemblage de pierres, de ciment,
de bois et de verre, ni qu’un numéro sur un cadastre. Chacun sait bien que les
liens créés avec une maison, avec un quartier, prennent racine dans des zones
d’émotion où des mots tels que famille, foyer, souvenir, histoire, patrimoine
prennent tout leur sens. Les initiateurs de ce projet urbanistique ont porté
atteinte à ces zones sensibles, invisibles mais bien réelles, et comment ne pas
comprendre la force de notre mobilisation, de notre détermination, et de la
solidarité qui nous est témoignée.
AM
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